Envisager de procéder à une hausse des tarifs d’électricité, autour de huit pour cent. (8%) a sans doute été une mesure arbitraire pour les consommateurs et usagers du courant électrique au Sénégal. Suffisant pour que Momar Ndao et le collectif des imams de Guediawaye montent au créneau. Selon le leader consumériste et patron de l’Ascosen c’est appel au non paiement des factures ne demande, ni plus, ni moins, …, de la désobéissance civile.
Comme pour reprendre le guide Gandhi qui le 11 septembre 1906 évoquait la première campagne de désobéissance civile contre les lois discriminatoires qui opprimaient les Indiens en Afrique du Sud ; les « courant’sommateurs » et leurs associations veulent contre attaquer par cette stratégie d’action collective non-violente ( utilisée avec succès aux quatre coins du monde dans de nombreux combats pour la dignité humaine et les droits des peuples), au risque de vivre dans le noir : Satyagraha !
« Il faut que les consommateurs refusent de payer les factures. Et si la Sénélec est capable de couper le jus à quelques douze millions de sénégalais, nous retournerons aux bougies » lance Momar Ndao pour dire que le peuple est prêt a payer le prix qu’il faut afin d’affirmer leur pouvoir et faire aboutir leurs revendications. Ainsi après la marche et les manifestations de l’année dernière pour cette même cause, la stratégie actuelle des imams s’appelle Satyagraha ou « la voie de la vérité ».
Et a Gandhi de préciser que:« En appliquant le Satyagraha, j’ai découvert, dans les dernières manifestations, que la poursuite de la vérité n’admettait pas que la violence soit imposée à son opposant, mais qu’il doit être sevré de l’erreur par la patience et la sympathie. Pour ce faire, ce qui apparait comme vrai pour un doit apparaitre faux pour l’autre. Et la patience signifie souffrance personnelle. En bref, la doctrine signifie la revendication de la vérité, pas par infliction de la souffrance sur l’adversaire mais sur soi. »
Cette attitude de désobéissance civile, très légitime quelque part – à l’instar de celui qui fut mené par Gandhi et qui participa, sans pour autant en être la cause réelle, à l’indépendance de son pays – s’applique cette fois-ci légitimement à la lutte du peuple sénégalais dans le contexte d’inflation devenue insupportable.
Ce mouvement, même s’il semble a priori paradoxalement ne pas avoir été suivi en masse, a eu beaucoup d’échos auprès des gouvernants, et a suscité un certain recul de la part des autorités en charge du courant électrique au Sénégal.
De l’apologie de la désobéissance civile
L’appel des consommateurs du courant électrique entre en droite ligne dans une logique de « consumer-action » c’est-à-dire de consommation responsable, réfléchie et non de consommation pour consommer. Ainsi face a ce qui est considéré par les consuméristes comme des dérives de la société en charges de l’électricité, l’attitude adéquate demeure la réactivité par la mobilisation, la négociation, de non violence voire même de désobéissance civile. Si Gandhi l’a découvert 1907 lors de son deuxième séjours en prison. il faut dire que le terme même de désobéissance civile est de Henry David Thoreau.
Ces principes directeurs de la désobéissance civile ont fondé le concept de Satyagraha et ont permis au leader Hindo de mener sa lutte non violente contre le racisme en Afrique du Sud et de s’opposer à la politique coloniale du Royaume-Uni en Inde, puis pour l’indépendance de l’Inde.Pour Gandhi, de même que pour Martin Lutter King la désobéissance civile n’existe, à proprement parler, qu’en relation directe avec la non-violence. En effet nous pouvons constater, dans notre pays, que la dernière stratégie des imams de Guediawaye entre dans ce cadre en pratiquant la désobéissance civile sans faire usage explicite de la non-violence. Les temps changent mais le concept de la désobéissance civile garde toute sa pertinence, dans un contexte de crise ou toute confrontation physique risque d’engendrer des dégâts immenses à la charge du contribuable.
Une Action d’influence, Ni immorale, Ni criminelle.
En tant qu’action politique, la désobéissance civile est une initiative collective et organisée visant à exercer sur les pouvoirs publics une pression qui les oblige à rétablir le droit.La mobilisation autour de la question de la cherté de l’électricité est peut être une action politique. Mais les associations qui s’activent autour de cette problématique ( les imams de Guediawaye ) ont-elles aussi compétence a s’intéresser a l’art de gouverner la cite même si leurs détracteurs les cantonnent aux actions purement religieuses. Dans le cas d’espèce l’appel a la désobéissance civile est morale et est amplement justifiée. Non seulement Il s’agit d’un droit à l’objection de conscience, fondé sur l’obligation de la conscience individuelle de refuser d’obéir à une mesure injuste, mais, au-delà de cette reconnaissance, il s’agit du droit des citoyens de désobéir à la loi pour affirmer leur pouvoir et faire aboutir leurs revendications .
Aux yeux de la loi la désobéissance civile peut être considérée comme une garantie non juridictionnelle des libertés publiques. Elle n’est pas explicitement reconnue dans notre constitution. Toutefois l’article 2 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen dispose que : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression. »
La désobéissance civile n’est pas injustifiée et aurait même un caractère citoyen car n’enfreignant pas les règles de la civilité.En ce sens le philosophe français, spécialiste de Gandhi et de la non-violence Jean-Marie MULLER nous dit : « La racine étymologique du mot civil est le terme latin civilis qui lui-même provient de civis, citoyen. Le premier sens de la désobéissance civile est donc qu’elle est une désobéissance citoyenne. Mais le terme civilis signifie plus que cela. (…) Civilis s’oppose à criminalis. »
La désobéissance est civile en ce sens qu’elle n’est pas criminelle, c’est-à-dire qu’elle respecte les principes, les règles et les exigences de la civilité. La désobéissance civile est la manière civilisée de désobéir. Elle est civile du fait qu’elle n’est pas violente. Afin de rester civique la désobéissance doit être une action de non violence.
Action d’influence, de propagande, pour le changement de la politique liée aux questions de l’électricité, l’effort de mobilisation lancé par les Imams et les associations de «courant’sommateurs» doivent toujours privilégier la force de l’argument, le refus ou la désobéissance (si nécessaire) pour le triomphe de la coopération sociale et de la non violence.
Aujourd’hui, le concept s’est étendu à travers le monde notamment par les actions de désobéissance (comme moyen ponctuel ou permanent) très médiatiques des altermondialistes ou celles des mouvements antipub,
La désobéissance civile initiée par les imams vise à appeler aux débats publics. Débat auquel les medias et les auteurs engagés ont déjà pris part a travers l’affirmation de conscience par la plume et la parole et ils prendront l’opinion publique à témoin de la justice de leur cause.
Aboubacar sadikh ndiaye
sources:Chronique « Intelligence Stratégique » du magazine Nouvel Horizon